Hildegarde de Bingen est d’une modernité confondante. Pourtant, dire d’elle que sa pensée est moyenâgeuse serait historiquement exact. Mais pas du tout dans les faits pour le coup ! Hildegard Von Bingen est une religieuse allemande née en 1098 et elle est décédée en 1179. Déjà, notez la longévité de sa vie. Elle a vécu 81 ans : plus qu’un record pour l’époque ! Est-ce parce qu’il était allemand aussi que Benoît XVI en a fait la quatrième femme docteur de l’Église en 2012 ? Peut-être. Ou peut-être réparait-il une injustice en reconnaissant sur le tard (mille ans après tout de même) l’héritage conséquent que cette abbesse a laissé ? Les avis sont partagés. Qu’ils continuent.
Hildegarde, cette touche-à-tout
Mélody Molins a écrit l’ouvrage qui nous occupe aujourd’hui. Cette naturopathe a fondé et dirige l’Institut Hildegardien, structure assez rare en francophonie. Et dans ce livre, naturellement, elle a voulu partager l’énorme enseignement de la religieuse bénédictine (non, pas comme Guillaume de Baskerville dans le Nom de la Rose, le fameux livre d’Umberto Eco : lui était franciscain. En revanche, le monastère de l’action était bien bénédictin). Elle ne manque pas de nous la présenter en premier lieu, puis on passe au vif du sujet. Il y a en effet de quoi faire. Hildegarde a un point de vue sur tout ce qui fait nos vies. Un art de vivre hildegardien en somme. Elle avait tout consigné dans… douze livres à l’époque !
Hildegarde : le corps, l’âme, l’esprit
Voilà une approche encore avant-gardiste de nos jours, c’est dire. L’harmonie entre les trois doit être parfaite pour que nous soyons en bonne santé. Vaste programme, mais elle a tout prévu. D’abord, l’exercice physique. Ensuite, le soin de l’âme par la prière évidemment, mais également par la méditation ou l’écoute de chants par exemple. Car Hilderarde est une musicienne, elle a appris la musique durant l’enfance comme toutes les jeunes filles bien nées dont elle faisait partie. Et elle a beaucoup composé. Enfin, elle soigne l’esprit par de bonnes dispositions, des interrogations sur nos décisions de tous les jours, sur nos valeurs, etc.
Ensuite, après cette présentation, Mélody Molins se penche sur d’autres sujets, en particulier l’alimentation selon Hildegarde. Bonne nouvelle : la plupart des choses que l’abbesse préconise, nous allons les trouver à proximité. Le monde du XIIe siècle n’était pas le nôtre. Il lui manque beaucoup de contrées et de produits qui n’étaient pas découverts à l’époque. C’est du local, pas d’avocat, de quinoa ou encore du très trendy chou kalé ! On nous assure que c’est bon, facile, digeste et anti-stress. Et que le régime alimentaire de l’intrigante soeur, en plus d’aider à réguler son poids, apporte donc la vitalité et… la joie !
L’épeautre… une céréale très ancienne qui revient petit à petit au goût du jour.
L’épeautre, l’arme secrète d’Hildegarde
La joie viendrait de cette céréale proche du blé, longtemps oubliée mais qui revient au goût du jour depuis une dizaine d’années. Elle était après tout assez populaire du temps d’Hildegarde. Choisissez-le non-hybridé, c’est-à-dire sans être croisé. Il sera alors très riche, notamment en tryptophane. C’est un acide aminé proche de la sérotonine, la fameuse hormone du bonheur. Vous voyez donc d’où vient cette joie, de cette céréale qui sera servie à tous les repas dans un régime hildegardien idéal. Car cet acide aminé est loin d’être la seule richesse de cette céréale.
En magasin, on l’appelle Grand Épeautre. Et on insiste sur le non-hybridé. Quand il est mélangé donc hybridé à du blé (10% de blé), le Grand Épeautre perd la plupart de ses bienfaits. Dans ce cas, choisissez les variétés répondant aux doux noms de Grand rouquin, Oberkulmer ou Frankenkorn. Les intolérants seront contents d’apprendre que, non-hybridé, l’épeautre ne déclenche aucune réaction, y compris aux allergiques et à ceux qui craignent le gluten. Mais l’introduction doit se faire pas à pas.
Vous apprendrez aussi en feuilletant cet ouvrage ou en vous y plongeant franchement pourquoi il vaut mieux manger vos fruits et légumes cuits. Pourquoi il vaut mieux manger chaud et manger certaines épices souvent. Et pourquoi la prune, la pêche, la fraise, le poireau et le porc ne sont pas recommandés dans votre alimentation. Ça vous intrigue, hein ?
L’hygiène de vie d’Hildegarde : une détox avant la lettre ?
Il y a les partisans du mot détox et ses détracteurs. Nous allons plutôt évoquer des recettes purifiantes et fortifiantes dans les préceptes prônés par Hildegarde. Persil, fenouil, absinthe (!!!) au programme mais le jeûne également, étroitement surveillé : décidément, cette abbesse est d’un modernisme confondant ! Elle se révèle également férue de lithothérapie, la meilleure santé par les pierres, souvent précieuses ou semi-précieuses. Surprenante Hildegarde ? Oui, c’est certain ! Et cette collection d’ouvrages ne fait que commencer. Le second, prévu en mars 2020, vous aidera à cuisiner à la manière d’Hildegarde à chaque moment : piques-niques, repas entre collègues, menus de fêtes. Ces 200 pages seront également illustrées de photos des recettes et d’une foule d’informations pratiques sur l’alimentation hildegardienne au quotidien.
Hildegarde pour les débutants par Mélody Molins, éditions IH, 15 euros.
À paraître en mars 2020 : Hildegarde dans ma cuisine, par Mélody Molins, éditions IH, 20 euros.